Renversants Gardens by the Bay
SINGAPOUR

Des prouesses architecturales humaines que je rêvais de visiter, aucune ne dégageait en vrai la magie que je leur prêtais. Le Taj Mahal, en Inde, l’Opéra de Sydney, en Australie, la Grande Muraille de Chine, toutes ces réalisations ont gagné mon admiration sans me renverser à la hauteur de mes attentes trop élevées. Sauf peut-être la Sagrada Familia, cette cathédrale en construction perpétuelle à Barcelone, et les Gardens by the Bay, à Singapour.
Ces jardins, îlot de verdure au sud de la ville-État de Singapour, sont devenus une des images de marque de la destination. Avant la pandémie, ils ont reçu 13,7 M de visiteurs en une seule année. On y trouve des arbres géants de conception humaine, des promenades suspendues et des dômes futuristes où poussent fleurs et forêt tropicale. C’est l’ingéniosité à son meilleur et les touristes paient le gros prix pour visiter ses attractions.
Pour une première impression, la visite en soirée est complètement renversante. Au cœur des jardins, 12 des 18 arbres géants s’illuminent pour un spectacle sons et lumières gratuit tous les soirs, à 19 h 45 et à 20 h 45. Mieux vaut s’y présenter au moins 45 minutes à l’avance pour trouver un endroit confortable où se poser. Pour une expérience immersive, on cherche le centre de la forêt nouveau genre.

Dès que les premières notes se font entendre, il devient difficile de battre des paupières tellement on ne veut rien manquer. C’est comme s’offrir des feux d’artifice sous une forme complètement nouvelle. La magie m’a frappé directement entre les deux yeux, tellement que même les onomatopées ne me venaient pas pour souligner mon étonnement. Je n’avais rien vu d’autre des jardins, mais je savais que j’y passerais le plus clair de la journée suivante.
Les super-arbres sont presque aussi impressionnants de jour. Construits de béton et d’acier, ils sont couverts de 162 900 plantes et sont en fait des tours de ventilation dotées de panneaux solaires pour capter de l’énergie qui servira entre autres à rafraîchir les serres du jardin. Une passerelle relie plusieurs d’entre eux et donne une vue aérienne du jardin en plus d’offrir un point de vue unique sur le mythique hôtel Marina Bay Sands.
Le super-arbre le plus volumineux est quant à lui doté d’un observatoire, à 50 mètres de hauteur, réparti sur trois étages. Il n’est pas relié à la passerelle et nécessite un billet différent pour obtenir un droit d’accès.




On peut passer beaucoup de temps, également, dans l’un des deux dômes vitrés qui rappellent la coquille d’un mollusque. Le premier, le Flower Dome, détient le record de la plus grande serre vitrée au monde. Elle a la taille de 75 piscines olympiques et peut accueillir jusqu’à 1000 personnes à la fois.
C’est probablement ce qui m’a donné envie de fuir quelques minutes après m’y être enfoncé : l’omniprésence des visiteurs tranchant avec le calme qu’inspirent les baobabs, les oliviers ou le jardin méditerranéen. On y trouve notamment un olivier vieux de 1000 ans.
Le billet combiné avec la forêt tropicale de la Cloud Forest, dans le deuxième dôme, coûte environ 52 $. Les deux pavillons, ensemble, comptent 226 000 plantes de 800 espèces. Alors que le dôme des fleurs reproduit un climat méditerranéen, la forêt tropicale, elle, réplique les conditions trouvées entre 1500 et 3000 mètres d’altitude, avec un taux d’humidité de 80 à 90 %.
Parce qu’on n’a pas fait les choses à moitié à Gardens by the Bay, on peut apercevoir, dans ce dôme, une des chutes intérieures les plus hautes du monde, alors que la cascade de 35 mètres en est la pièce maîtresse. Là, un parcours permet de concentrer la circulation dans un chemin balisé, si bien que le mouvement y est constant. On s’élève jusqu’au haut de la chute avant de redescendre doucement sur une passerelle suspendue.
Orchidées et plantes carnivores, comme la dionée attrape-mouche et la sarracénie, ne sont que des exemples des espèces disséminées le long du chemin. Jusqu’à la fin septembre, une expérience immersive sur le thème du film Avatar ajoute une touche de fantastique au parcours, permettant entre autres de voir l’allure et la taille que nous aurions sur Pandora.






Le dôme aux fleurs reproduit le climat méditerranéen.
Le dôme aux fleurs reproduit le climat méditerranéen.

Dans le dôme Cloud Forest, une passerelle permet aux visiteurs de circuler.
Dans le dôme Cloud Forest, une passerelle permet aux visiteurs de circuler.

Les dômes ont l'allure d'une carapace de mollusque.
Les dômes ont l'allure d'une carapace de mollusque.

À 35 m, la cascade de la Cloud Forest est une des chutes intérieures les plus hautes du monde.
À 35 m, la cascade de la Cloud Forest est une des chutes intérieures les plus hautes du monde.

Le dôme aux fleurs compte aussi un jardin de baobabs.
Le dôme aux fleurs compte aussi un jardin de baobabs.
Je m’y suis sans doute attardé plus que l’heure et demie recommandée.
Pour les repas, l’isolé Satay by the Bay, avec sa panoplie de petits restaurants, est sans doute un choix plus intéressant et plus abordable que les restaurants de burgers au cœur de l’action. Pour économiser, mieux vaut manger à l’extérieur des jardins, mais il suffit de se laisser emporter un tout petit brin de rien du tout pour y passer une journée complète et se retrouver le ventre vide. Partir des jardins pour y revenir plus tard, après un repas, constituerait une perte de temps importante.
Pour la petite histoire, Gardens by the Bay visait à aménager « une ville » dans un jardin. Futuriste, le site a coûté plus d’un milliard de dollars de Singapour. Une compétition internationale de design, à laquelle ont participé 170 firmes provenant de 24 pays, a permis de couronner en 2006 un concept imaginé par deux firmes du Royaume-Uni. La construction a commencé en novembre 2007.
Derrière les prouesses architecturales, le concept de développement durable devait être exploité à son maximum. La conception des serres permet par exemple d’utiliser 30 % moins d’énergie pour le refroidissement que pour tout autre bâtiment similaire. Ses panneaux de verre sont conçus pour laisser passer la lumière tout en filtrant la chaleur.

Les lacs des jardins sont pour leur part munis de plantes aquatiques purifiant l’eau qui sera par la suite utilisée pour arroser les plantes du complexe.
Des mangroves, quant à elles, attirent des espèces menacées comme la libellule des mangroves et ont la capacité d’emmagasiner des gaz à effet de serre.
Tout ça semble bien vertueux, et Gardens by the Bay vaut chaque minute d’une journée qu’on y consacrerait, mais une fois l’émerveillement passé, on verra aussi tout l’aspect artificiel du site.
Quoi qu’il en soit, le temps passé là m’a forcé à sacrifier d’autres visites dans Singapour et je n’ai aucun regret. Ça me fera une excuse pour revisiter ce micro-État et retourner explorer davantage sa riche gastronomie.
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